Août 02, 2023

Épisode #55 : Revue semestrielle des marchés et mise à jour sur l’inflation

Description: 

Dans cet épisode, James Parkyn et François Doyon La Rochelle commencent le balado aujourd’hui par la revue des statistiques de marché en date du 30 juin 2023 puis update leurs auditeurs sur l’inflation.

Lire le script : 
    1. Introduction :

François Doyon La Rochelle : Bienvenue à Sujet Capital, un Balado mensuel à propos de la gestion passive de portefeuille et de la planification financière et fiscale pour les investisseurs à long terme.

Vos hôtes pour ce Balado sont James Parkyn et moi-même François Doyon La Rochelle, tous deux gestionnaires de portefeuilles avec PWL Capital.

Au programme aujourd’hui pour l’épisode #55 :

Pour notre premier sujet, nous ferons la revue et commenterons les statistiques de marché pour l’année en date du 30 juin.

Et ensuite, pour notre second sujet, nous ferons une mise à jour sur l’inflation.

Veuillez aussi noter, avant que nous passions à nos sujets, que nous prendrons une pause estivale. Nous serons de retour pour notre prochain épisode le 28 septembre.

Bonne écoute !

    1. Revue semestrielle des marchés :

François Doyon La Rochelle : Je vais commencer notre Balado aujourd’hui par la revue des statistiques de marché en date du 30 juin 2023.

Après une année 2022 très difficile, une année au cours de laquelle presque toutes les classes d’actifs ont enregistré des pertes importantes, je suis sûr que nos auditeurs vont être soulagés et heureux d’apprendre qu’au cours du premier semestre 2023, les actions et les obligations ont généré des rendements positifs. Ces rendements positifs sont généralisés puisque toutes les classes d’actifs qu’on suit, à l’exception d’une, sont en territoire positif.  A titre de rappel, vous pouvez trouver notre page de statistiques de marché sur notre site Internet Sujet Capital dans la section ressources ou sur le site Internet de PWL Capital dans la section dédié à notre équipe. On va partager le lien pour les statistiques de marché avec le podcast.

James Parkyn : Effectivement, François, après l’année 2022 où les actions et les obligations ont été fortement malmené en même temps, les investisseurs devraient être satisfaits des rendements enregistrés depuis le début de l’année.

François Doyon La Rochelle : Tout à fait James, surtout que la plupart des experts des marchés étaient sceptiques quant aux perspectives des marchés en début d’année. Plusieurs d’entre eux prévoyaient une récession qui ne s’est pas encore matérialisée.

James Parkyn : En effet François, elle ne s’est pas encore matérialisée. La croissance du PIB reste positive, la consommation des ménages reste obstinément forte et la création d’emploi se poursuit à un rythme soutenu, tant ici au Canada qu’aux États-Unis. Les experts s’attendent cependant que la croissance du PIB ralentisse, qu’elle se contracte même, au cours des prochains mois, en raison du cycle de resserrement des taux d’intérêt imposé par les banques centrales.

À titre de rappel, afin de ralentir l’inflation qui a atteint l’an dernier un sommet de 8,1 % au Canada et de 9,1 % aux États-Unis. La Banque du Canada a augmenté son taux directeur qui se situait à 0,25 % en mars 2022 à 5 % en juillet 2023. Aux États-Unis, on a vu des hausses semblables. La Réserve fédérale a augmenté le taux des fonds fédéraux de 0,25 % à une fourchette de 5.25% à 5,50%.

François Doyon La Rochelle : Le cycle de resserrement de taux a quand même eu l’effet espéré sur l’inflation puisqu’elle a baissé ici au Canada et aux États-Unis à 2,8% et 3% respectivement, ce qui se rapproche de la cible à long terme de 2 % fixée par les deux banques centrales. Ceci dit, le cycle de resserrement a aussi fait des dommages collatéraux, en particulier dans les banques régionales américaines, car les fortes hausses des taux d’intérêt ont placé certaines banques dans des positions délicates, ce qui a entraîné l’intervention de la Réserve fédérale.

James Parkyn : Les banques régionales n’ont pas été la seule source d’inquiétude pour les marchés au cours du premier semestre, il y a eu une nouvelle crise politique liée au plafond de la dette aux États-Unis qui a fait la une des journaux pendant plusieurs semaines jusqu’à ce qu’un accord sur le relèvement de la limite de la dette soit conclu en juin.

François Doyon La Rochelle : Malgré tout ce bruit, les marchés boursiers ont connu un bon premier semestre, en particulier aux États-Unis et dans les marchés développés internationaux. Ces marchés sont maintenant dans un bull market (marché haussier) parce qu’ils ont augmenté de plus de 20% par rapport aux bas atteints en octobre 2022. On va examiner les détails un peu plus tard, mais l’indice S&P500 aux États-Unis a augmenté, en dollars américains, de 27,5 % depuis le bas et l’indice des actions développées internationales, le MSCI EAFE (acronyme pour les actions d’Europe, Asie et Extrême-Orient) a augmenté d’environ 32,8 % depuis le bas. Ici, au Canada, on n’est pas encore dans un marché haussier puisque l’indice S&P/TSX Composé n’a augmenté que de 12,8 % depuis le creux d’octobre 2022.

James Parkyn : Ça peut surprendre certains investisseurs qui sont encore sous l’emprise émotionnelle du biais de récence de l’année dernière, mais l’histoire des marchés financiers nous enseigne que des fortes hausses de marchés arrivent très souvent à la suite de marché baissiers ou en anglais ‘Bear Market’.

François Doyon La Rochelle : Absolument James et il y a un bon graphique de Dimensional dans leur revue semestrielle qui montre, sur la base des données de l’indice Fama/French du marché total américains qui couvre la période de juillet 1926 à décembre 2022, qu’historiquement, après une baisse du marché de 20%, le rendement moyen après un an est de 22,2%, que le rendement moyen cumulé après 3 ans est de 41,1% et que le rendement moyen cumulé après 5 ans est de 71,8%.

James Parkyn : Oui, ces données sont très intéressantes et elles nous rappellent qu’il faut rester discipliné dans les marchés baissiers, qu’il faut rester investie et qu’on doit suivre son plan à long terme. La majorité des investisseurs ne peuvent pas se permettre de rater les hausses de marché qui suivent les ‘Bear Market’.

François Doyon La Rochelle : Malgré la belle remontée depuis le creux de l’année dernière, je pense qu’il est important de mentionner que les principaux indices ne sont pas de retour à leurs niveau maximal historique.

James Parkyn : Effectivement, en date du 30 juin, le S&P500, le MSCI EAFE et le S&P/TSX Composite sont encore entre 5% et 7 % en bas de leurs sommets.

François Doyon La Rochelle : Ceci dit, on va maintenant regarder en détail les statistiques du marché au 30 juin en commençant par les titres à revenu fixe canadiens. Comme vous le savez, 2022 a été une année historiquement difficile pour les obligations, la pire année depuis plusieurs décennies. A titre de rappel, en 2022, les obligations canadiennes à court terme ont baissé de 4,04 % et l’ensemble du marché obligataire Canadien, qui détient des échéances plus longues, a enregistré une baisse considérable de 11,7 %.  Depuis le début de l’année, au 30 juin, malgré une augmentation des taux d’intérêt de 1 % par la Banque du Canada, les obligations canadiennes à court terme ont augmenté de 1,01 % et le marché obligataire total canadien a augmenté de 2,51%.

James Parkyn : Ça fait du bien d’enfin de voir des chiffres positifs dans le marché obligataire François, mais les performances que tu cites sont des chiffres de rendement total, donc ça inclut les revenus d’intérêts. Si on regarde seulement le prix des obligations, les obligations à court terme ont effectivement légèrement baissé tandis que ceux des obligations à plus long terme ont légèrement augmenté.

François Doyon La Rochelle : Tu as raison James, le prix des obligations sont en baisse, surtout du côté des obligations à court terme, ceci à cause de l’impact des dernières hausses de taux d’intérêt de la Banque du Canada. À titre indicatif, le rendement des obligations du gouvernement du Canada à échéance dans deux ans était de 3,82 % au début de l’année et il est maintenant à 4,21 %, le prix de ces obligations a donc baissé. Il faut se souvenir que les rendements et les prix des obligations évoluent dans des directions opposées.  Du coté des obligations à échéances plus longues, le rendement des obligations du gouvernement du Canada venant à échéance dans 10 ans était de 3,30 % au début de l’année et il se situait à 3,26 % au 30 juin, donc le prix a quelques peu augmenté.

James Parkyn : Pour ceux qui recherchent la sécurité des certificats de placements garantie (CPG), on peut avoir des rendements intéressants en ce moment, allant de 5,5 % pour un CPG d’un an à 5,2 % pour un CPG de cinq ans.

François Doyon La Rochelle : On va regarder maintenant du côté des actions, les marchés boursiers du monde entier ont progressé partout depuis le début de l’année. Les actions canadiennes ont augmenté de 5,70 %, principalement grâce aux titres de croissance, puisque l’indice de croissance des grandes et moyennes capitalisations a eu un rendement de 8,1 %, contre 4,0 % pour les titres de valeur des grandes et moyennes capitalisations. Les actions à petite capitalisation ont également eu un rendement positif avec une performance de 3,0 % depuis le début de l’année.

Aux États-Unis, le marché boursier total américain a eu une performance de 16,2 % en dollars américains, mais puisque le dollar canadien s’est apprécié par rapport au dollar américain, la performance en dollars canadiens était moindre à 13,5 %. Depuis le début de l’année, les actions de croissance de grande et moyenne capitalisation ont largement surpassé les actions de valeur, avec une performance en dollars canadiens de 26 % contre seulement 2,7 % pour les actions de valeur. Les actions de petites capitalisations ont enregistré une performance de 5,6 % en dollars canadiens, les titres de petite capitalisation croissance ont à nouveau mieux faites que les titres de valeurs avec une performance de 10,9 % contre un maigre 0,1 % pour les titres de petite capitalisation valeur.

James Parkyn : Pour les titres de croissance, c’est un revirement complet par rapport à ce qui s’est passé l’année dernière, Il faut se rappeler qu’en 2022 les actions de croissance de grande et moyenne capitalisation ont fortement chuté alors que les titres de valeur de grande et moyenne capitalisation n’avaient pratiquement pas baissé. Cette année, une poignée d’actions à grande capitalisation (en anglais on dit Mega-Cap) dominent les rendements du marché boursier américain. Selon Morningstar, au 31 mai 2023, 97 % de la performance de l’indice Morningstar U.S. Large and Mid-Cap, qui suit de près l’indice S&P500, provenait des 10 plus grands titres de l’indice. Ça signifie que seulement 3 % du rendement de l’indice provient des quelque 700 autres titres de l’indice Morningstar.

François Doyon La Rochelle : Oui, les performances du marché américain depuis le début de l’année sont très concentrées sur quelques actions et quelques secteurs. Si on regarde les cinq principaux titres du S&P500, à savoir Apple, Microsoft, Amazon, NVIDIA et Alphabet (Google), leur performance depuis le début de l’année, au 30 juin, varie de 36 % pour Alphabet à 189 % pour NVIDIA. En termes de secteurs, 4 secteurs sur 7 affichent des performances négatives au premier semestre. Les secteurs les plus performants sont ceux de la technologie, des services de communication et de la consommation discrétionnaire.

Selon un rapport de RBC Global Asset Management, depuis le 1er janvier 2020, seulement sept titres de l’indice S&P500 ont produit plus de la moitié de son rendement cumulé. Ces titres sont Meta, Apple, Alphabet, Microsoft, Amazon, NVIDIA et Tesla.

James Parkyn : C’est très frappant, mais ça veut aussi dire que pour les gestionnaires actifs qui font de la sélection de titre pour bâtir votre portefeuille (ou stock picking en anglais) et que s’ils ne détiennent aucun de ces titres, ils ont probablement sous performer de beaucoup le S&P500. N’oubliez pas qu’il y a des milliers d’actions sur le marché américain et encore plus si on inclut le marché mondial. La recherche académique démontre que la plupart des actions, sont moins performantes que les bons du Trésor américain sur de très longues périodes.

François Doyon La Rochelle : C’est exact et c’est l’une des raisons pour lesquelles les stock pickers ont du mal à battre les indices. C’est pourquoi nous utilisons des fonds ou FNBs qui sont largement diversifiés pour bâtir nos portefeuilles. On veut s’assurer d’avoir les tous les titres les plus performants dans les comptes de nos clients.

Enfin, pour ce qui est des actions internationales de pays développées, les actions à grande et moyenne capitalisation ont également bien faites depuis le début de l’année. Elles ont eu une performance de 12,1 % en monnaie locale. En dollars canadiens, les actions des pays développés ont augmenté un peu moins, soit de 9,1 %. C’est parce que le dollar canadien s’est apprécié par rapport au panier de devises inclus dans l’indice MSCI EAFE. Là encore, les actions de croissance à grande et moyenne capitalisation ont surpassé les actions de valeur. Elles ont eu une performance de 11,5 % en dollars canadiens, contre 6,7 % pour les actions de valeur à grande et moyenne capitalisation. Comme aux États-Unis et au Canada, les actions de petite capitalisation ont été à la traîne des actions à grande et moyenne capitalisation, avec une performance de 3,1 %, performance également en dollars canadiens.

En conclusion, les marchés émergents ont bien fait avec une performance de 2,6 % depuis le début de l’année. Contrairement aux marchés développés, les actions de valeur et les actions de petites capitalisations se sont mieux comportées que les actions de croissance et les grandes capitalisations.

Donc, je pense que ça fait le tour.

    • Mise à jour sur l’inflation :

Francois Doyon La Rochelle : Comme deuxième sujet aujourd’hui on fait une mise à jour sur l’inflation, on en a beaucoup parlé dans notre podcast depuis le printemps 2022. Donc, James, peux-tu commencer par nous donner un résumé de la situation actuelle des taux d’inflation ?

James Parkyn : François, l’inflation s’est ralentie le mois dernier pour atteindre son rythme le plus faible en deux ans. Aux États-Unis, l’indice des prix à la consommation a augmenté de 3 % en juin par rapport à l’année précédente, ce qui est nettement inférieur au récent pic de 9,1 % atteint en juin 2022. L’indice de l’inflation de base, qui exclut les prix volatils de l’alimentation et de l’énergie, a également enregistré en juin sa plus faible hausse mensuelle depuis plus de deux ans. Bien que le taux d’inflation dans le rapport de juin sur l’IPC reste supérieur au niveau souhaité par la Fed, les données suggèrent des progrès évidents dans la réduction des pressions sur les prix vers des niveaux plus acceptables.

François Doyon La Rochelle : Au Canada, les nouvelles sont encore meilleures.  Le dernier rapport nous donne une inflation qui s’est établi à 2,8 % en juin donc c’est très encourageant mais, James qu’en est-il en l’Europe et au Royaume-Uni ?

James Parkyn : L’inflation a baissé à 5,5 % dans les 20 pays utilisant l’euro et à 7,9 % au Royaume-Uni, mais ça reste bien supérieur à l’objectif de 2 % des banques.

François Doyon La Rochelle : James, est-ce qu’il y a un consensus parmi les économistes ? Est-ce que les banques centrales peuvent crier victoire sur l’inflation ?

James Parkyn : Nick Timaros dans le WSJ rapporte que : « Certains décideurs politiques et économistes de la Fed craignent que le ralentissement de l’inflation soit temporaire. Ils considèrent que le ralentissement de l’inflation était attendu depuis longtemps après la disparition des chocs liés à la pandémie qui ont fait grimper les loyers et les prix des transports et des voitures. Ils craignent que les pressions sous-jacentes sur les prix ne persistent, ce qui obligerait la Fed à relever ses taux et à les maintenir plus longtemps.  Leur plus grande crainte est de savoir si la croissance des salaires et des prix peut ralentir suffisamment sans qu’il y ait une récession.

François Doyon La Rochelle : Oui, Karen Dynan, une économiste à l’université de Harvard, est citée dans cet article. Elle déclare : « Bien que les choses semblent aller dans la bonne direction en ce qui concerne l’inflation, nous ne sommes qu’au début d’un long processus ».

James, qu’est-ce que les économistes de l’autre côté du débat disent ?

James Parkyn : Nick Timaros poursuit et déclare que : « D’autres économistes affirment que ce raisonnement ne tient pas compte des signes de ralentissement économique actuel qui atténueront progressivement les pressions sur les prix. Ils affirment également que l’inflation ralentira suffisamment pour que les taux d’intérêt « réels » ou corrigés de l’inflation augmentent dans les mois à venir. Ça permettrait de renforcer l’impact des augmentation des taux d’intérêt, même si la hausse des taux du 27 juillet est la dernière du cycle de resserrement actuel”.

François Doyon La Rochelle : Donc le débat est beaucoup plus autour de l’inflation des salaires.  Le premier camp d’économistes est nerveux car il n’y a pas de marge de manœuvre et trop de demande dans l’économie pour être raisonnablement confiant que l’inflation va revenir à l’objectif de 2 % de la Fed dans les années à venir.

James Parkyn : Exactement François.  Plusieurs de ces économistes craignent que la croissance des salaires soit trop forte. En l’absence de récession, ils estiment qu’un marché du travail surchauffe poussera l’inflation de base à la hausse en 2024.  Étant donné qu’un marché du travail en surchauffe est susceptible de se manifester d’abord au niveau des salaires, beaucoup d’économistes considèrent les augmentations de salaire comme un bon indicateur de la pression inflationniste sous-jacente.  La notion derrière cette pensée, est qu’une croissance annuelle des salaires de 3,5 % serait compatible avec une inflation entre 2 % et 2,5 %, à condition que la productivité augmente d’environ 1 % à 1,5 % par an.

François Doyon La Rochelle : Selon l’indice du coût de l’emploi du ministère américain du travail, les salaires ont augmenté de 5 % dans la période de janvier à mars par rapport à l’année précédente. La Fed surveille de près cet indice car c’est la mesure la plus complète de la croissance des salaires.

James Parkyn : Le second camp d’économistes François estime qu’il existe de nombreuses preuves que le marché du travail se refroidit, ce qui réduit les pressions inflationnistes. Ils soulignent que le temps nécessaire aux chômeurs pour trouver un nouvel emploi s’est allongé. L’augmentation du nombre d’heures travaillées par les employés du secteur privé a ralentie en même temps que le nombre d’emplois non comblés.

Benjamin Tal, économiste en chef adjoint chez CIBC World Markets, a dit dans le Global Mail qu’: « Il s’attend à ce que l’économie saigne des postes vacants plutôt que des emplois. À savoir, les entreprises n’embaucheront pas mais ne licencieront pas. »

François Doyon La Rochelle : La nouvelle encourageante dans tout ça c’est que la baisse de l’inflation va permettre aux banques centrales d’être plus patientes et de prendre leur temps avant de procéder à de nouvelles hausses de taux.

James Parkyn : Absolument François.  Aux États-Unis, le mois dernier la Fed a maintenu son taux directeur de référence pour les fonds fédéraux dans une fourchette comprise entre 5 % et 5,25 %. C’est la première fois qu’elle fait une pause après dix augmentations consécutives depuis mars 2022.  À titre de rappel, les hausses de taux d’intérêt ralentissent l’économie par le biais des marchés financiers en réduisant le prix des actifs et en augmentant le coût de l’emprunt.

François Doyon La Rochelle : Le 27 juillet, la Fed a augmenté le taux des fonds fédéraux de 25 points de base pour atteindre une fourchette cible entre 5,25 % et 5,50 %. Cette augmentation était attendu par les marchés.  Ça correspond au sommet précédent atteint en 2006-07. Il faudrait remonter à 2001 pour trouver une période où les taux étaient plus élevés qu’aujourd’hui. La vitesse et l’ampleur de la hausse (plus de 500 points de base en 16 mois) est inégalée depuis le resserrement de la Fed en 1980. Ceci dit, l’inflation, selon l’indice des prix à la consommation, se rapproche de l’objectif de 2 % de la Fed, mais James qu’est-ce que les banques centrales disent des derniers chiffres d’inflation ?

James Parkyn : Elles ont toutes le même message en insistant sur le fait que les conséquences économiques vont continuer à s’aggraver si l’inflation échappe à tout contrôle.  Le gouverneur de la Banque d’Angleterre, Andrew Bailey, a été cité dans le Financial Times : « Notre tâche consiste à ramener l’inflation à son niveau cible et nous ferons ce qui est nécessaire.  Je comprends les préoccupations qui en découlent, mais je crains de devoir toujours dire – que le résultat est pire si nous ne ramenons pas l’inflation à son niveau cible ». Donc François, malgré le risque d’entrainer une récession, les banques centrales insistent sur le fait qu’ils prévoient de maintenir les taux à leur niveau élevé pendant un certain temps – en effet, probablement plus longtemps que ne le prévoient les marchés boursiers et obligataires. En résumé, Ils me semblent Francois qu’elles sont très synchronisées.

François Doyon La Rochelle : Je suis d’accord James.  En fait, la Banque des règlements internationaux (ou la BRI), l’organisation mondiale des banques centrales basée en Suisse, semble également d’accord.  Dans un récent rapport, la BRI a souligné que depuis le début de l’année 2021, près de 95 % des banques centrales du monde ont relevé leurs taux. Cette synchronisation parmi les banques centrales est plus élevée lors du choc pétrolier inflationniste des années 1970.  La BRI a qualifié cette situation de « resserrement de la politique monétaire le plus synchronisé et le plus intense depuis des décennies ».

James Parkyn : Je pense que l’on reconnaît de plus en plus que des erreurs de politiques monétaires ont été commises pendant la pandémie. Selon moi, ça m’indique que les taux d’intérêt doivent être normalisés à des niveaux beaucoup plus élevés que les taux très bas en vigueur pendant la pandémie.

François Doyon La Rochelle : James qu’est-ce que les économistes disent de l’impact de la politique fiscale, autrement dit, au niveau des dépenses publiques sur l’inflation ?

James Parkyn : Le journaliste David Parkinson a récemment posé la question suivante dans le Globe & Mail : « Dans quelle mesure le problème persistant de l’inflation au Canada peut-il être imputé aux dépenses du gouvernement ? »  Dans son article, qui fait suite à la dernière hausse des taux d’intérêt de la Banque du Canada, il souligne que le gouverneur, Tiff Macklem, a noté dans les dernières projections économiques de la Banque, que la croissance des dépenses publiques est d’environ 2 %, ce qui correspond au taux estimé de croissance de la production potentielle de l’économie. Selon lui, cela signifie que la contribution du gouvernement à l’équilibre entre l’offre et la demande de l’économie est neutre. Il avance que ça n’aide pas à résoudre le problème de l’excès de demande qui continue d’alimenter les pressions inflationnistes. Mais d’un autre côté, il n’aggrave pas non plus le problème.  Mais il affirme également que si l’on compare les dépenses publiques aux niveaux antérieurs à la pandémie, la politique fiscale en matière des dépenses est stimulatrice.

François Doyon La Rochelle : Intuitivement, les gouvernements pourraient également contribuer à la lutte contre l’inflation. Ils pourraient réduire les dépenses qui sont essentiellement financées par des déficits afin de diminuer la demande. Je pense que ça aiderait les banques centrales parce qu’elles auraient moins besoin d’augmenter les taux d’intérêt.

James Parkyn : À ce sujet, François, Gita Gopinath, directrice exécutive adjointe du Fonds monétaire international, dans un discours prononcé lors de la conférence annuelle de la Banque centrale européenne (BCE) à Sintra, au Portugal, le mois dernier, a affirmé que « certains effets secondaires de la lutte contre l’inflation par la politique monétaire pourraient être réduits en donnant à la politique fiscale des dépenses un rôle plus important. »

Mme Gopinath a ajouté : « Compte tenu des conditions économiques dans lesquelles nous nous trouvons, à la fois en raison d’une inflation élevée et de niveaux d’endettement record, ces deux éléments plaident en faveur d’un resserrement de la politique fiscale. Si l’on examine les déficits budgétaires prévus pour de nombreux pays du G7, on s’aperçoit qu’ils sont trop élevés pour trop longtemps.  »

François Doyon La Rochelle : Elle a également lancé un avertissement et je la cite : « Les banques centrales doivent accepter la « vérité inconfortable » qu’elles devront peut-être tolérer une période plus longue d’inflation supérieure à leur objectif de 2 % pour éviter une crise financière ».

James, la baisse de l’inflation est-elle une bonne nouvelle pour les investisseurs ?

James Parkyn : Oui, je pense que le fait que les taux plus élevés pour plus longtemps seraient une bonne nouvelle pour les investisseurs. Je pense également que la vraie nouvelle est que nous commençons maintenant à obtenir des taux d’intérêt réels positifs. Enfin, de nombreux économistes prévoient une baisse des taux de la Banque centrale de 2024 et pour certain, ça sera en 2025. Preston Caldwell, économiste en chef chez Morningstar, a déclaré dans un rapport récent que « l’inflation montre maintenant des signes généralisés de décélération » et que « la Fed est toujours susceptible d’augmenter ses taux lors de sa réunion de juillet, mais le rapport d’aujourd’hui sur l’inflation selon l’IPC soutient notre opinion selon laquelle la Fed passera à une réduction agressive en 2024 après la chute de l’inflation ».  Francois, on le sait la Fed a effectivement augmenter ses taux à la réunion de juillet.

François Doyon La Rochelle : Pour les investisseurs qui ont évité les titres à revenu fixe par crainte des hausses de taux, c’est peut-être maintenant le temps de réexaminer vos portefeuilles de titres à revenu fixe.  Les investisseurs reçoivent maintenant un rendement réel positif, c’est-à-dire après l’inflation, avec leurs investissements obligataires. Ce qui n’a pas été le cas depuis belles lurettes.

James Parkyn : L’exemple parfait est que nous obtenons maintenant de bien meilleurs taux sur les CPG.  Récemment, les taux des CPG étaient autour de 5.5% pour 1 an, et autour de 5,2 % pour 5 ans.  Ces taux sont nettement plus élevés que notre estimation du rendement attendu des obligations de 4,26 %. Nos auditeurs peuvent consulter le plus récent rapport de PWL que l’on vient de publier sur les hypothèses de planification financière. Malgré la hausse générale des prix des obligations, les rendements aujourd’hui plus élevés qu’ils ne l’ont été pendant la majeure partie de la dernière décennie.

François Doyon La Rochelle : À l’heure actuelle, les titres à revenu fixe vous procurent un bon revenu. Sur une base « réelle », les taux semblent très attrayants si on les compare aux prévisions d’inflation pour les années à venir.  Par exemple, l’estimation de PWL pour l’inflation est à 2,2 % par an. Un investisseur qui achète un CPG à échéance dans 5 ans, comme tu l’as mentionné James, obtiendrait 5,2 %, soit un rendement réel de 3 %.

James Parkyn : En conclusion, François, la clé pour les investisseurs est que même si les banques centrales augmentent encore un peu leurs taux, la fin du cycle haussier actuel se profile à l’horizon, à moins d’une résurgence de l’inflation.  Comme nous l’avons dit à maintes reprises, nous ne faisons pas de Market Timing, autant du côté des actions que des obligations.  Spécifiquement pour les obligations, n’essayez pas de prévoir le sommet des taux d’intérêt.

Je veux également François partager avec nos auditeurs une citation intéressante de Dimensional qui provient de son rapport semestriel et je cite :  » Ce que les investisseurs savent, c’est que les marchés continueront à traiter rapidement les informations au fur et à mesure qu’elles seront disponibles. Un plan à long terme, axé sur les objectifs individuels et fondé sur la confiance dans les prix du marché, peut placer les investisseurs dans les meilleures conditions pour vivre une bonne expérience, quoi qu’il arrive. »

François Doyon La Rochelle : En d’autres termes, James, il ne faut pas essayer de deviner la fin du cycle de hausse des taux.

Je rappelle à nos auditeurs que notre discipline consiste à investir avec « l’état d’esprit de l’investisseur, axé sur le long terme ».  On ne veut pas se laisser influencer par le bruit à court terme des médias financiers et par la volatilité des marchés.  C’est un défi de taille qui s’applique à tous les investisseurs, même aux professionnels.  On l’a souvent répété dans notre podcast : « C’est simple à dire mais pas facile à faire : Il faut toujours être conscients qu’on peut tomber dans le piège d’essayer de « prévoir l’avenir ».

    • Conclusion :

François Doyon La Rochelle : Merci James Parkyn d’avoir partagé ton expertise et ton savoir.

James Parkyn : il m’a fait plaisir Francois.

François Doyon La Rochelle : Hé bien c’est tout pour ce 55ième épisode de Sujet Capital !  Nous espérons que vous avez aimé.

N’hésitez pas à nous envoyer vos questions et suggestions. Vous pouvez nous joindre par courriel à: sujetcapital@pwlcapital.com

De plus, si vous aimez notre podcast, partagez-le avec votre famille et vos amis et si vous n’y êtes pas abonné, faites-le SVP.

Encore une fois, merci d’être à l’écoute et joignez-vous à nous pour notre prochain épisode à paraitre le 28 septembre exceptionnellement car nous prenons une pause pour l’été.

Profitez de votre été et à bientôt!

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Statistiques de marché – Juin 2023

 

     

    À propos de l'auteur(e)
    James Parkyn
    James Parkyn

    James est co-fondateur de PWL Capital. Il est chef d’équipe et gestionnaire de portefeuille basé au bureau de Montréal de PWL Capital Inc. Il a joué un rôle déterminant dans la croissance de l’entreprise depuis sa création en 1996.

    François Doyon La Rochelle
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