Les investisseurs ont connu une décennie exceptionnelle. Les marchés boursiers ont grimpé, les portefeuilles se sont envolés.
Il est tentant de croire que cela constitue la nouvelle norme. Certains investisseurs en viennent à s’attendre à des gains boursiers à deux chiffres année après année. Ils peuvent même réduire leur épargne ou nourrir de grands espoirs de retraite anticipée.
Mais attention : les prochaines années risquent d’être beaucoup moins généreuses.
Deux fois par an, PWL Capital met à jour ses prévisions à long terme sur les rendements espérés des actions et des obligations au cours des 30 prochaines années.
Notre dernière mise à jour indique que les investisseurs peuvent s’attendre à un rendement annuel de 4,5 % pour les actions mondiales (après inflation), et de 1 % pour les obligations.
Ce chiffre pour les actions est bien inférieur aux rendements réels de 8 à 12 % auxquels beaucoup d’investisseurs et de conseillers s’attendent, selon un récent sondage de Natixis.
Ces attentes optimistes ne sont pas réalistes, explique Raymond Kerzérho, chercheur principal chez PWL. Il a co-rédigé la mise à jour et en a discuté dans notre plus récent balado Sujet Capital.
Raymond précise qu’il ne s’agit pas d’une prédiction, mais d’une hypothèse de planification. Ces chiffres servent à établir des plans financiers et des projections de retraite à long terme pour nos clients. Ils comportent aussi une marge d’erreur importante : nul ne peut prédire l’avenir !
Cela dit, voici ses estimations de rendements nominaux :
Raymond prévoit également une inflation à long terme de 2,5 %. Autrement dit, les rendements réels des actions devraient être bien en deçà de ce que prévoient investisseurs et conseillers.
Les actions devraient faire face à des vents contraires, car les valorisations sont historiquement élevées. L’indice S&P 500 a rapporté 15 % par an au cours de la dernière décennie, « bien au-dessus de son rendement annualisé à long terme de 10,3 % », a récemment noté Jason Zweig, chroniqueur au Wall Street Journal.
Tenir pour acquis des rendements élevés peut entraîner « un grave déficit » si les marchés trébuchent, a-t-il averti.
Le problème, dit-il, « c’est qu’un marché haussier nourrit la complaisance. Des rendements énormes donnent l’impression qu’une retraite confortable est à la portée de tous, sans effort ni sacrifice. Et c’est une dangereuse illusion. »
L’immobilier n’échappe pas non plus aux attentes exagérées. La plupart des gens ont une grande partie de leur patrimoine investi dans leur résidence principale. Mais autre constat frappant : Raymond prévoit une appréciation annuelle à long terme de seulement 1 % pour les maisons, après inflation. Et cela n’inclut même pas les coûts liés à la propriété (impôts fonciers, assurances, entretien).
Ce 1 % peut surprendre les Canadiens habitués aux flambées de prix. Mais comme le souligne Raymond, la surperformance récente est l’exception, pas la règle.
« Comparé aux actions, à long terme l’immobilier résidentiel ne fait pas le poids, a-t-il expliqué à notre balado. Si l’on tient compte de l’inflation et de tout l’argent réinvesti dans une maison, le rendement d’une résidence personnelle n’est pas impressionnant. »
PWL n’est pas la seule à avertir d’un ralentissement futur des rendements. En fait, nos attentes sont plus optimistes que celles d’autres grandes firmes de placement.
Comme Raymond l’a souligné l’an dernier, nos prévisions à long terme pour les obligations canadiennes et la plupart des marchés d’actions sont supérieures à celles de quatre autres firmes que nous avons étudiées.
« Certains auditeurs pourraient penser que nous sommes trop conservateurs dans nos hypothèses de rendement, mais en réalité, nous sommes un peu plus optimistes que plusieurs grandes institutions », dit Raymond.
Ces avertissements contrastent fortement avec les attentes des investisseurs. Portés par des années de gains boursiers impressionnants, ceux-ci prévoient 10,7 % de rendement annuel réel à long terme pour les actions mondiales, selon le sondage 2025 de Natixis auprès des investisseurs individuels.
Les attentes sont encore plus élevées pour les actions américaines : 12,6 % par an. Même les conseillers anticipent 8,3 % après inflation, selon le sondage.
« J’ai été choqué en lisant ça », a confié Raymond. « C’est insensé… Un rendement réel de 10,7 %, ça n’arrivera pas. Peut-être sur de courtes périodes, mais à long terme, impossible…
C’est le rôle de votre conseiller de vous informer sur le rendement attendu de votre portefeuille. Si votre conseiller ne vous a pas fixé des attentes raisonnables, vous devriez envisager un changement. »
Conclusion : le passé ne prédit pas l’avenir. On ne conduit pas en fixant le rétroviseur. On ne devrait pas non plus prendre ses décisions de placement de cette façon.
Restez discipliné et fidèle à votre plan d’investissement à long terme. Vous ou votre conseiller devriez rééquilibrer vos placements périodiquement pour les aligner sur vos cibles d’allocation.
Profitez des gains du passé, certes. Mais ne bâtissez pas votre avenir sur l’hypothèse qu’ils vont se répéter.
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Les portefeuilles modèles et les statistiques de marché sont disponibles sur le site de l’équipe Parkyn-Doyon La Rochelle de PWL Capital ainsi que sur le site de Sujet Capital. Vous y trouverez aussi d’autres analyses et réflexions sur la finance personnelle et l’investissement dans notre balado, nos blogues et nos livrets électroniques.